CLÉO + we only part to meet again.

Le regard rivé sur son téléphone portable, James poussa un long soupire alors que la voiture dans laquelle il se trouve, le mène jusqu’à une soirée caritative dont les bénéfices seront reversés à une association qui aide les femmes victimes de violences conjugales. Il est le parrain de cette association depuis des années et ne manque jamais une seule soirée, mais il est vrai que ce soir, il aurait aimé être ailleurs. La journée fut particulièrement longue et éprouvante ; être à la tête d’un tel empire ne lui laissait que très peu de répit et la fatigue se faisait de plus en plus présente. Combien de temps tiendrait-il encore ? Aucune idée. Mais en tous les cas, James ne faisait pas parti de ces personnes qui abandonnent à la moindre difficulté.

Lorsque la voiture s’immobilisa, il rangea son cellulaire dans la poche intérieure de sa veste et attendit que la portière s’ouvre pour s’extraire de l’habitacle. Déjà, les flashs se mirent à crépiter et il arbora son sourire de circonstances. Son père lui avait bien dit qu’il devrait sourire souvent, dès que l’occasion s’en présenterait, qu’il en abuserait même, pour le bien de sa réputation. Il ne forçait pas le trait pour autant, son sourire restait sobre. James évita soigneusement les questions des journalistes et entra finalement dans la salle de réception où se déroulait la soirée.

Il salua quelques personnes, fit en sorte d’être un parfait gentleman ; d’ailleurs, il l’était toujours. Il n’était pas connu pour faire des faux pas, bien au contraire. Il gardait un contrôle absolu de lui-même, si bien qu’il en paraissait froid et arrogant parfois – tout ce qu’il n’était pas, en somme. Il déclina le verre de champagne qu’une serveuse lui proposait et opta pour un whisky, sachant qu’il n’en n’abuserait pas. Il n’était pas homme à boire jusqu’à l’ivresse.

James scruta les personnes dans la salle et lorsqu’on regard se posa sur une silhouette familière, un sourire vint étirer le coin de ses lèvres. Sourire qu’il dissimula en buvant une gorgée du liquide ambré, avant de faire quelques pas en direction de la jeune journaliste. Il se saisit d’une coupe de champagne – pour elle -, et s’arrêta à ses côtés. « Mademoiselle Jones. » Glissa-t-il pour la saluer avant de lui tendre la coupe. « J’ignorai que vous aviez été conviée à la soirée. » Ajouta James en posant son regard sur elle. Non pas qu’il n’appréciait pas sa présence, c’était même tout le contraire.

La présence de Cléo, bien loin d’être dérangeante aux yeux de James, le laissait quand même perplexe. Il ne se souvenait pas avoir entendu que la jeune journaliste serait présente dans la salle, mais puisqu’elle était là, il n’allait pas faire comme si elle n’existait pas ou qu’il n’appréciait pas la compagnie de la demoiselle – aussi curieuse soit-elle. Car son plus gros défaut était sans doute sa déformation professionnelle, cette manie de toujours poser des questions, de creuser trop loin, de vouloir gratter en dessous de la surface pour connaître les moindres secrets… Cela le mettait parfois mal à l’aise, sans doute parce que James ne cachait pas grand-chose, mais qu’il ne souhaitait pour autant pas que sa vie soit étalée au grand jour.

Ainsi, la jeune femme était ici avec une amie ? Cela expliquait pourquoi son nom n’était apparu nulle part. Bien, sa curiosité à lui était maintenant satisfaite, mais pas la sienne visiblement. Un mince sourire étira les lèvres de l’homme d’affaires qui tourna la tête vers Cléo en haussant un sourcil. « Vous me posez vraiment la question ? » Demanda-t-il assez amusé. Et sans même lui laisser le temps de répondre, il enchaina : « Si vous l’ignorez, c’est que vous n’êtes pas une aussi bonne journaliste que je le croyais. » Qui ignorait en ce bas monde que James parrainé cette association depuis des années et qu’il en était le plus gros donateur ? Il se connaît presque corps et âme pour cela, pour que les femmes puissent à l’abri de ces monstres. « Et j’espère que vous n’êtes à la pêche aux informations ? Ou si c’est le cas… Vous devriez très sérieusement faire un papier sur ces femmes qui se battent au quotidien pour retrouver une vie normale. » Il bu une nouvelle gorgée de whisky et reposa le verre sur le buffet. « Je ne suis pas certain que ma vie soit plus intéressante que les histoires qu’elles pourraient vous raconter. » Pas qu’il sache, en tous les cas. Et puis, faire face à la jeune femme pourrait être… déstabilisant.